On ne peut plus rouler - Auto Reverse

Oui, ça sent l’éditorial Auto Plus à plein nez. Ce n’est pas le cas, c’est juste un petit topo. Sérieusement, n’en avez vous pas assez d’entendre cette phrase:

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« On ne peut plus rouler »

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Il y a dix ans, à la recherche d’une Porsche 964 -erreur de jeunesse- les quelques exemplaires sains vendus sur Paris l’étaient pour ce motif. La plupart des propriétaires songeant alors à se reconvertir en Smartiste de crainte de se retrouver un jour Voituresanspermiste.

Si l’on se risque à demander une argumentation, les motifs sont variés mais récurrents: On se fait flasher tout le temps, l’essence est trop chère, les contrôles techniques sont trop restrictifs, les autos polluent trop les poumons parisiens ou simplement parcequ’il n’y a plus de routes…

Ces routes qui ont commencé à se développer à l’aube du XXème siècle avaient pourtant autorisé les automobiles à atteindre des vitesses qui étaient déjà jugées dangereuses. Ainsi, le 10 Mars 1889, un des premiers décrets réglementant la circulation automobile était promulgué. Il limitait alors la vitesse maximale en automobile à 20 km/h en agglomération et 30 hors agglomérations. Ces premières limitations ne dureront toutefois pas.

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Dans les Années 60, 70, le réseau autoroutier commence à se tracer. Paris-Nice est l’occasion de mesurer la performance de son automobile, 5 heures était la cible à ne pas dépasser…

Je n’ai jamais connu cette époque. Mon père dévalait alors la nationale 7 au volant de sa Spitfire, pied au plancher. Ma présence en ce monde est certainement due à l’entêtement des britons d’utiliser des mécaniques asthmatiques dans des autos pour les appeler sportives. Il aurait possédé… ne serait-ce qu’une Audi A3 TDI, il eut fini encastré dans le premier platane en entrée du premier virage qui terminait sa première ligne droite.

A cette époque, n’importe quel individu avait accès à l’automobile et son corollaire de frime, conduite sportive et mort subite.  Le rapport à l’automobile était toutefois différent: elles étaient chères, demandaient un savoir faire mécanique. Conduire se méritait. On peut ainsi dire que la plupart des conducteurs l’étaient par volonté et par plaisir. Être un passionné, un gearhead n’était alors ni un succès, ni un accomplissement: c’était la conséquence de la possession d’une auto.

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C’est à ces années que l’on fait référence en disant « Avant, on pouvait rouler »

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A ce rythme, en 1972, 18 000 personnes se tuent sur la route en France. Il y avait alors 13 000 000 de voitures en circulation, donc 0,13% des possesseurs d’automobiles sont morts à leur volant en 1972. En comparaison, ils sont 0,01% aujourd’hui. Ce ratio entame sa première descente à partir de 1973 lorsque la ceinture est rendue obligatoire puis en 1974, la vitesse redevient à nouveau limitée sur la route: 90 en rase campagne, 110 sur voies rapides et 130 sur autoroute.

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La France compte aujourd’hui presque 40 millions de voitures. On ne les achète plus, on loue une prestation de transport individuel. Le besoin est simple: pouvoir aller d’un point A à un point B. Entre temps, elle ne doit pas chauffer, pas vibrer, pas consommer d’essence, et si possible bercer ses occupants dans une douce musique MP3 tout en prodiguant de judicieux conseils par l’entremise du GPS. Le conducteur profite alors de ce moment pour consulter ses derniers EMails ou ses derniers commentaires sur Instagram (Ouah! de Mptrucl, Trop Cool! de JCeco). Et après on entend un peu partout que la voiture autonome n’a pas la côte? Soyons sérieux: nous y sommes déjà, vous n’êtes déjà plus au volant. Il vous a été insidieusement reprise par l’ESP, puis par les directions électriques, les commandes drive-by-wire, la boite pilotée et les carrosseries de SUV qui sont aussi à l’aise en conduite rapide qu’un footballeur à la grande dictée.

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On ne veut plus rouler.

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Le tableau est noir n’est-ce pas? Voilà quelques années, j’ai plaqué mon SUV pour reprendre ma vieille et fidèle MG. J’en ai pâti quelques jours. Puis mes vieilles habitudes sont revenues: partir un peu plus tôt le matin, prendre la route nationale, m’arrêter boire un café de temps en temps… Au plus je roulais, au plus j’étais content. Du trajet que tentais d’écourter j’avais fait un moment de relâche et de plaisir.
Oui, j’ai perdu quelques points mais je n’ai fait que très peu d’excès de vitesse. On peut s’amuser au volant d’une auto sans pour autant se transformer en danger public.

Les barrières entre nous et notre liberté d’aimer l’automobile, c’est nous qui les avons dressées. La vie n’est pas faite pour être ennuyeuse, on devrait tout vivre avec passion. Devenez un rebelle automobile: fuyez les embouteillages, prenez un peu plus de temps dans votre journée. Acceptez le sacrifice d’un peu de confort et lisez vos mails une fois au bureau. Apprenons à redevenir ceux qui méritent l’automobile.

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7 Réponses

  1. Grégoire

    Idem, 100% d’accord!!!
    Depuis que je me suis séparé de ma Jaguar, je suis comme en apnée en attendant ma prochaine auto-passion…
    Sur les trajets Provence Massif Central que je fais plusieurs fois dans l’année, je subis la portion autoroutière A55-A6-A75 comme une punition et revis littéralement en touchant le réseau secondaire!

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  2. greg

    Je rejoins les autres, merci pour ce moment (!) de vérité.
    Ça me donne envie d’utiliser plus la Jag (dès qu’elle est sortie du garage!), et fi des remarques des clients sur le parking du boulot, elle vaut le tiers de leur scénic.
    Quelle belle auto la BGT.

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  3. poum

    Tenter de survivre en panda 1000 sous un violent orage a été une expérience proportionnellement aussi intense que l’ennui démentiel ressenti à bord d’un rcz.

    Qu’elle soit douce, éprouvante, surprenante ou chronophage, ne nous laissons pas confisquer la poésie du voyage par des putains de cabines de téléportation.

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  4. Se5

    je vais au travail en ancienne très régulièrement : c’est peu maniable, ca sent l’essence imbrulée, à chaque rond point le pont craque. Je me réjoui lorsque je regarde les passants et autres, médusés par cette bizarrerie automobile (loin du standard SUV)… au final c’est que du bonheur ! Je ne peux qu’approuver votre article!

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