L’histoire automobile japonaise débute en
Europe comme un remake Turque de Star Wars…
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Pastiches d’américaines avec de petites roues, performances médiocres, image négative… Enfant, vous ne comptiez plus les pompistes qui importunaient vos parents: « Elle marche à piles votre Mazda? ». Pourtant, déjà, des modèles comme la 240Z, la 2000GT ou, pour parler de Mazda, le coupé Cosmo laissaient transpirer un fort potentiel dans les productions du soleil levant.
Intrigués par toutes ces automobiles, vous avez cependant persisté dans votre négation, reprochant aux japonaises leur manque de… caractère. Le caractère, lorsqu’on vous demande de le définir, c’est un subtil mélange de lunatisme et de rusticité saupoudré d’un peu de mauvaise humeur. Bref, une sorte de Barry White bûcheron, alcoolique et dépressif. Mais les temps changent. Et vous aussi.
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Après 10 années de quotidien
en anglaise, vous êtes las.
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Las de devoir centrer votre attention sur le moindre cliquetis suspect. Las de ne pas quitter des yeux cette maudite jauge de pression d’huile dès que vous abordez une route rapide. Las de tous ces efforts que vous demande la conduite de votre vieille anglaise pour si peu de remerciements.
Ainsi, en quête d’alternative, il est une option que vous vous obstinez à réfuter. Jamais vous ne vous êtes résolus à poser votre séant dans son petit siège en tissu. Jamais vous n’avez renoncé à un mauvais whisky pour un verre de Saké.
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Par moments, une Mazda MX5
serait plus facile à vivre…
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L’idée remonte à 1979. Kenichi Yamamoto interroge alors le journaliste automobile Bob Hall sur les produits que devrait lancer la marque Mazda. Amateur de Spitfire et de MGB, sa réponse est toute naturelle: Un roadster deux places!
Si cela nous parait évident aujourd’hui, en ce début des années 80 le pari est osé. Il n’existe plus guère que la Fiat 124 Europa et l’Alfa Romeo Spider pour défendre le bastion du roadster plaisir face aux pratiques et performantes comptactes Gtisées ver lesquelles se sont rués les cadres moyens, les constructeurs et plus tard, les minets et les beaufs.
Catapulté au poste de président de Mazda, Yamamoto donne son feu vert au projet Light Weight Sportscar en 1984. Il met en concurrence les trois bureaux d’étude de la marque et c’est le projet californien à moteur avant et roues arrière motrices qui remporte les suffrages. Lors du développement technique, en dépit du faible budget alloué, Toshihiko Hirai et Takao Kijima vont faire des miracles: structure monocoque, des faux châssis qui supportent les trains et une arrête centrale qui rigidifie le tout. Un moteur atmosphérique de 1600 cc3 est emprunté à la 323, positionné au plus près de l’habitacle, il autorise une répartition des masses idéale: 50/50.
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De la MGB, les japonais
ont gardé le meilleur: rien.
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L’histoire est ensuite connue: lancement en 1989, succès mondial, renaissance du roadster, montée en gamme, alourdissement, quête de puissance…
Aujourd’hui, vous allez finalement franchir le pas: vous allez prendre le volant de l’un des tous premiers exemplaires de Mazda MX5. Un modèle de 91, en parfait état. Le 1,6 litres produit 115 chevaux que rien n’empêche d’arriver aux roues: pas de direction assistée, pas d’air conditionné…
En faisant le tour de l’auto, l’ensemble est réalisé avec une sobriété de bon ton. A l’exception des poignées de porte chromées qui ont autant leur place ici qu’une horloge franc-comtoise dans un magasin Ikéa, aucun détail n’est ostentatoire, l’ensemble est fonctionnel, simple mais soigné. Certes, le design est calqué sans équivoque sur une Lotus Elan, en plus grosse. Pourtant, nulle trace de néo-rétro vulgaire. Alors qu’aujourd’hui une Z3 ressemble à une espadrille usée, le dessin tout en retenue de la MX5 n’a pas lassé.
Sous le capot en aluminium trône une mécanique belle et bien pensée, qui n’a rien à envier à un bialbero transalpin. Pour une auto du début des années 90, Mazda a eu l’élégance de tout laisser apparent. Aucune forêt de durites, aucun cache en plastique n’encombre la salle de machines. C’en est presque dommage que le tout soit assez fiable tant il doit être agréable de bricoler la dedans.
A bord, le design est tout aussi minimal: Certes, un journaliste automobile patenté reprocherait des plastiques durs et une profonde absence de rangements. Si pour vous, une automobile se doit de transporter une armada de canettes et de bouteilles, qu’un tableau de bord doit être caressé tel un chien fidèle après chaque enchaînement de virages, et si vous pensez qu’un aérateur peut changer la face du monde, passez votre chemin. Pour les autres, vous serez satisfait de ce simple moulage en plastique avec quelques boutons, tous fonctionnels. Vous y trouverez l’essentiel de ce qui est nécessaire à la conduite d’une auto. Assis bas, la position de conduite ne dépayse pas l’amateur de sportives anglaises que vous êtes: jambes tendues, bras légèrement fléchis, un tout petit levier de vitesse qui vous tombe sous la main… Même la toile utilisée pour les sièges est d’un maillage épais, sans noblesse, mais certainement conçue pour résister à une catastrophe nucléaire. Parmi les petites attentions, il est possible de décapoter seul, assis dans la voiture, en un tour de reins.
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Dans les appuie-tête, des petits haut-parleurs
relaient la stéréo pour vous éviter d’alerter
tout le quartier au son de Mr. Grieves.
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A ce propos, venons en au fait. Démarrons.
Le moteur se lance sans vibrations et… sans bruit. Si Mazda a choisi de ne pas exacerber la mélodie de sa mécanique par un échappement de la taille d’un lance-grenades, le manque de sportivité de l’ambiance sonore vous déçoit légèrement.
En sortant du petit chemin de terre où était parquée l’auto, ses roues n’ont de cesse de rechercher la motricité, on vous avait prévenu, c’est joueur! Le plus étonnant pourtant, provient de la rigidité de l’ensemble, pas de vibration, pas de bruit parasite, aucune remontée dans la direction.
Une fois sur la route, vous enchaînez les rapports, sur le couple. La boite se révèle assez lente, son ressenti est très mécanique, son maniement agréable, mais vous devez prendre soin de bien décomposer vos mouvements pour passer les vitesses. Le jeu est amusant: les débattements sont si courts qu’une flexion du poignet suffit à la commander.
Sur une allure de cruising, le châssis se montre extrêmement confortable, l’auto accepte de reprendre sur le couple et les virages s’enchaînent sans le moindre roulis. Dans de longues lignes droites il vous est difficile de conserver une trajectoire droite en raison du flottement de la direction.
Votre passager, le propriétaire, commence à s’endormir. Il vous suggère vivement d’augmenter l’allure. Vous obtempérez. En descendant un rapport, le 1600 bondit vers la zone rouge. Un bruit métallique émanant du capot envahit l’habitacle. Les montées en régime, sans être vigoureuses, sont volontaires. Le flou dans la direction disparaît et l’arrière, sans sollicitation expresse de votre part, ne se montre pas aussi vif que vous l’auriez imaginé. La voiture prend une légère gîte, ce qui ajoute un peu de fun à la conduite. La sensation de vitesse et le plaisir au volant sont réels. Pourtant, après un rapide coup d’oeil au compteur, vous êtes déçus: Oui, vous aviez l’impression d’aller vite, non, vous ne roulez pas vite. Un Kangoo mené par un Varois enragé pourrait certainement vous dépasser.
Les sensations que la Mazda distille sont franches. La Mazda MX5 NA avait tout juste: sans être rétro, elle est la digne descendante des Sports Car des années 60. A bord de ces autos, la performance pure n’était pas un élément important. La seule chose importante était l’engagement du conducteur, sa capacité à maîtriser plusieurs centaines de kilos de mécanique et d’acier pour les jeter de virage en virage. La seule différence est qu’elle ne s’épuise jamais. Elle ne chauffe pas, ne cliquette pas et ne perd pas de roue lorsque vous prenez trop d’appui.
Est-ce une bonne auto? Rationnellement, la MX5 est le meilleur roadster jamais fabriqué. Endurante, plaisante, sportive et confortable, vous seriez fou de ne pas en acheter une au regard des prix actuels. Jamais, même en la comparant a une moto, un dériveur ou une real doll, vous ne trouverez un meilleur moyen d’investir 5000 euros dans un objet qui vous procure autant de plaisir.
Est-elle amusante? Oui, à coup sûr. Facile, directe, enthousiaste, la Mazda Mx5 réunit le meilleur du roadster classique et la fiabilité des autos japonnaises du début des années 90.
Est-elle émouvante? Malheureusement, en dépit de toutes ses qualités, la Miata ne mérite que la seconde place de votre garage. Celle de la voiture que vous utiliserez lorsque la MG, la Spitfire ou l’Austin Healey seront en panne… C’est-à-dire très souvent.
Le marché de la MX5 est très vaste, du modèle anglais profondément modifié affichant 270 000 kms pour 1200€ à la MX5 NA première série affichant 70 000 kms pour 7000€. Un import anglais n’est pas une mauvaise idée tant l’offre est importante outre manche. Méfiez-vous tout de même de ne pas acheter une Eunos, c’est à dire une MX5 japonaise, impossible à immatriculer en France. Un autre marché riche en bonnes affaires est l’Allemagne, avec une importation française assez facile.
Concernant les défauts, ils sont assez rares. Les premiers modèles, appelés « Nez court » on un défaut de conception du vilebrequin dont la tête peut casser sur un mauvais couple de serrage. Les deux autres défauts sont le faisceau d’allumage qui durcit en vieillissant (une blague!), engendrant quelques ratés, et le cylindre récepteur d’embrayage qui peut rendre l’âme (une autre blague pour l’homme amateur d’automobiles de caractère).
Sachez que contrairement aux idées reçues, une MX5 rouille. Vérifiez bien la zone du coffre, des planchers et les longerons à proximité de la roue AR.
Enfin, concernant les pièces, l’origine Mazda coûte une fortune. Cependant, en tout bon roadster de grande série, la Mazda MX5 dispose d’un réseau d’innombrables revendeurs tant en pièces mécaniques, de carrosserie ou de performance (Moss, Quartierdejantes, MX5 légende, Driftpieces.fr…).
- Grosse élan
- Couple moteur/châssis parfait
- Fiabilité hors pair
- Manque de... caractère
- Direction floue
- Boite lente
Merci Hugo pour ce reportage! Je possède depuis 2001 une NA 115cv de 1991 et je confirme tout les commentaires rapportés ici.
Si la MX5 n’est pas faite pour parcourir de longs parcours sur autoroute (elle assure tout de même sans problème), elle est la reine des petites routes virvolteuses. Mais pas seulement, c’est aussi aussi une excellente voiture secondaire à la place d’une banale clio ou autre pour se trainer tout les jours dans les embouteillages. Et le weekend, je pari que vous laisserez votre « familiale » et envoyez les enfants chez leurs copains pour vous régaler de petites balades à deux.
C’est une voiture économique au jour le jour : assurance raisonnable,7l au 100, fiabilité légendaire, (il est étonnant de voir l’état des durites et autres soufflets de cardan: comme neuf après 24 ans!).
J.ai une nb cuir et bois en vert anglais de 2000 . Un régal je m’en sert tout les jour pour aller au travail quand madame n’est pas plus rapide que moi !!!
Je découvre votre site… Avec enthousiasme et plaisir et j’aime votre ton décalé, plein d’humour. Si nous rêvons (ma compagne et moi… Si, si une femme peut rêver d’une Lotus Elise), nous possédons depuis un peu plus d’un an une MX 5 NB… Le plaisir automobile accessible. Et si parfois n peut regretter le manque de puissance, elle sait se faire joueuse et décrocher du train arrière. Cela reste selon moi l’une des grandes réussites automobiles de la fin du XXe siècle. Juste une quête de l’essentiel, fiable, amusante…
Super article, un régal à lire comme d’habitude. La MX-5 me fait rêver, mais pas assez de sièges pour la famille…