La Peugeot 403 fut présentée pour la première fois à Paris en 1955. C’est la première berline à caisse ponton de la très sérieuse marque Sochalienne. Ses 1100 kilos de bon acier français sculptés par l’italien Pininfarina (en s’inspirant d’une fiat déjà démodée!) sont propulsés par un 1468 cm3 de 58 cv, ce qui n’augure rien de bon coté performances. Mais là n’est pas le désir de Peugeot: avec la 403 il s’agit avant tout de proposer une auto rigoureuse, fiable, économe. Elle sera même la première automobile à disposer en option d’une honteuse motorisation diesel!
En bref, la 403 est une voiture que l’on ignore
Mais voilà, mon père en possède une depuis plus de quinze ans: Son achat remonte aux débuts de la restauration de son mas varois. Il avait alors besoin d’un camion fiable pour transporter pierres et matériaux. Il s’est logiquement orienté vers un pick up Peugeot de 1963, usé jusqu’à la corde. Après une brève remise en état, cette bonne vieille lionne n’a eu de cesse de nous accompagner au son souffletant de son 4 cylindres anémique.
Pour ses
premiers tours de roues, elle a traversé Nice comme une star, transportant un escalier design pour un hôtel de luxe et deux adolescents béats, alanguis au soleil sur le teck de sa benne, bercés par le flot des embouteillages. Elle fera sa reine en promenant quelques groupes de jazz tzigane dans les vieux villages du haut var.
Puis elle a commencé la maison. Elle en a gardé ses premières rayures, faites par les ronces des chemins de traverses sur lesquelles nous récupérions des pierres pour remonter les murs.
Elle poursuivra ainsi son quotidien, alternant foin, chaux, parpaings et autres échafaudages. Un soir, ses phares alimentés à la dynamo ne lui permettront pas d’éviter un sanglier, elle en ressortira avec sa première grosse bosse et un alternateur tout neuf.
Viendront mes premiers exploits routiers au volant d’une auto anglaise (que je surestimais sportive malgré sa petite taille). C’est avec mon père au volant que la 403 ramènera mon épave de mini à la maison. Le coup de foudre a commencé: jamais sa grande calandre rassurante n’a quitté mon rétroviseur.
Ecole de conduite…
La plus grande frustration possible en tant que jeune conducteur passionné d’automobile est l’impossibilité d’assurer une propulsion avant 24 ans: trop dangereuses… La 403 sera donc ma voiture école : au volant de cette propulsion sous motorisée, avec ses lames de ressort et ses pneus trop durs, sa direction à la démultiplication gigantesque, on prend les virages à 20 ou 30 km/H, entièrement en dévers, le train AR patinant sans un bruit tel un caddie de supermarché tandis que l’avant reste rivé au sol. Chaque mission pour la maison sera alors un prétexte pour prendre possession de la vieille camionnette. Sa suspension d’avant guerre avec lames et amortisseurs à levier, ses vitesses commandées au volant par un levier précis et son quatre cylindres volontaires marqueront à jamais ma culture automobile: je n’ai aujourd’hui pas honte de la dire, ce pick up est une des meilleures autos que j’aie jamais conduit!
Les aventures se sont succedées: l’anglaise fit des caprices le jour de mes exams, c’est le pick up défraîchit qui m’y conduira, sous une pluie battante, elle en conservera une rayure circulaire sur le pare brise suite à l’éjection d’un de ses essuie glace. Dans mes premières recherches d’emploi, fauché, c’est la seule auto qui me restera sous la main pour me rendre ici et là à quelques jobs pourris, parcourant la France à 110 km/h, en faisant la course avec les camionneurs. Essuyant le pare brise avec des journaux chipés dans une station service. Évitant de fumer dans l’habitacle après avoir remplis son réservoir qui déborde sous les sièges. Elle marquera à jamais mes vestes de costumes avec un ressort qui s’échappais de ses sièges avachis. Son neïman usé se brisera sous l’usure du quotidien, remplacé depuis par un bouton poussoir.
Bon an mal an, cette vieille auto rendra service à toute la famille, dans les bons jours comme dans les mauvais. Accumulant les stigmates qui font aujourd’hui son histoire. Le caractère de cette Peugeot vient de son omniprésence: elle traverse le temps gaillardement.
Dans 30 ans, je ne serai pas ému de retrouver une Ford Fiesta TDCI, à l’instar d’un dessert lacté, l’automobile est devenu un objet de consommation, vite achetée, vite utilisée, vite abandonnée. Mais les remarques des personnes rencontrées ici et là, émues de retrouver la 403 de leur jeunesse prouvent que Peugeot avait réussi sa mission: créer une auto suffisamment robuste et attachante pour traverser les époques.
- Capacité de chargement
- 3 places frontales
- Tenue de route amusante
- Consommation
- Rapport encombrement / Espace habitable
J’en possède une … grise Pick up ….de 1958 ….. je roule regulièrement avec (780 kms le week end dernier) … Que du bonheur ….
j’ai eu le plaisir d’en conduire une…génial!!
Quelle belle histoire! Nous porterons désormais un autre regard sur cette bonne vieille 403…
Elle sera de retour cet été, après une bonne révision!
Je suis tellement d’accord avec ce résumé sur la consommation moderne qui manque tellement d’état d’âme. Je l’observe impuissant tous les jours.
J’adore cette voiture qui m’a laissée quelques souvenirs d’adulescent utopiste! Trop loin, je suis content de la revoir ici en photo.